Tiri Carreras

Arcueil - France

Personnalité inconnue du grand public, Tiri Carreras mériterait pourtant de rencontrer la considération de ses semblables. Certes, la plupart seraient déroutés par son jeu atypique et crieraient que ce n’est pas de la musique. Peut-être, c’est à voir. Tout le monde s’accorderait, en revanche, à dire que ce qu’il joue est inclassable, voire que ce qu’il produit avec sa batterie est unique. Certains pourraient même dire que ce qu’il fait est grandiose.

Co-fondateur du collectif XoNdZf, Tiri Carreras participe à des formations qui ont pour nom : bBlunk, zblug, zVeep, bBrrAx, Van Beulk, Van zblic, eRraTz, aussi illisibles qu’imprononçables mais qui dénotent un humour certain et une créativité hors des normes, une volonté en tout cas de se positionner sur les marges dans les domaines qu’on peut qualifier de musique acousmatique, musique concrète, musique improvisée. Proche collaborateur de Benjamin Duboc, Sylvain Guérineau ou Dom Dubois-Taine, avec qui il se produit régulièrement, Tiri Carreras a une approche personnelle de la batterie et des percussions.

Ne cherchant pas, en effet, la rythmique comme fondement de sa pratique, il s’attelle plutôt à échafauder une dimension sculpturale de son instrument. À partir de frottements, de grincements, de raclages de peaux, il édifie des constructions compactes et mobiles dans lesquelles on décèle une quantité de détails. Cette musique de la masse, tellurique par sa puissance et son assise solide, se meut au fil de son évolution et génère des grondements prégnants ou de lointaines rumeurs diffuses avec une volonté d’avancée qui la rend particulièrement dynamique.

Car Tiri Carreras ne se contente pas de faire du bruit. En authentique concepteur-ordonnateur de son - en musicien en somme -, il dessine des paysages, trace des lignes fortes à gros grain tandis qu’évoluent de fines lignes métalliques, parfois proches de l’inaudible. Le tout, bien sûr, se croisant ou se chevauchant en permanence, dans une évolution générée par sa propre édification. Il en résulte un remplissage de l’espace sonore dans cette attention portée au timbre et pour l’auditeur, une jouissance immédiate du son en tant que tel dont le geste sûr et les capacités démiurgiques de Carreras rendent compte.

par Nicolas Dourlhès // Publié le 19 février 2023

 

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